Plein gaz sur le bioGNV

La première station de France de bioGNV (Gaz Naturel pour Véhicules), a été inaugurée le 3 octobre à Breuvannes-en-Bassigny (52).

Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique, chargée de la Biodiversité, est venue inaugurée la première station de biogaz non reliée aux réseaux. Les projets du même type sont nombreux, « le bioGNV représente une goutte d’eau sur le marché des énergies renouvelables », souligne Philippe Collin. © P. COLLIN

En 2010, Philippe Collin, agriculteur et éleveur dans la région naturelle du Bassigny, a mis en place une unité de méthanisation. D’une capacité de 350 kWh électricité, ce méthaniseur est capable de fournir plus de 700 foyers en électricité. Mais l’agriculteur ne s’arrête pas là. En 2019, un nouveau projet voit le jour sur son exploitation avec la mise en service d’une station de bioGNV. Ce gaz naturel est prélevé depuis son unité de méthanisation. Il produit 60 tonnes par an de biogaz soit l’équivalent de 1,5 million de kilomètres parcourus.

Rouler au vert local

« Ma réflexion sur l’installation d’une station biogaz m’est venue en 2016 lors de rencontres inopinées autour de la méthanisation, explique Philippe Collin. J’ai rencontré l’entreprise Prodeval, avec qui j’ai mûri puis construit le projet. » En France, l’agriculteur haut marnais est le seul à proposer une station de bioGNV non reliée aux réseaux de gaz. « J’ai trouvé moi-même mes clients. Aujourd’hui, sur la station, je fournis du biogaz au minibus scolaire, à quelques voitures et bientôt aux camions de la laiterie locale Saventia. » Stockés dans des bouteilles de gaz, 280 kg de bioGNV sont disponibles sur la station Eurek’Alias. L’approvisionnement est facile et sécurisé. L’agriculteur applique un tarif unique de 1,15 € / kg de biogaz prélevé à la pompe, prix garanti sur cinq ans. Une taxe de 0,15 € / kg est reversée aux services des douanes.

Le biogaz est plus économique que l’essence ou le diesel. Un kilo de biogaz correspond à 1,2 l de diesel et 1,4 l d’essence. La consommation pour un véhicule routier reste quasiment équivalente quelque soit le mode de carburant choisi. « Ce qui diffère, prévient Philippe Collin, c’est l’autonomie du véhicule, plus faible pour les équipements à biogaz. La consommation en biogaz de ma Citroën C3 est de 3 kg / 100 km avec une autonomie de 250 km. Pour éviter les pannes, les constructeurs ont équipés tous ces véhicules roulants au carburant vert d’un réservoir à essence. »

Limiter l’empreinte carbone

Le montant de l’investissement de la station s’est élevé à 300 000 €, frais de voiries et d’équipement compris. « Notre installation a été aidée par la région Grand Est à hauteur de 50 %, ce qui a favorisé sa mise en place, souligne Philippe Collin. Par ce projet, je souhaite montrer qu’il est possible de développer des énergies renouvelables, plus respectueuses de l’environnement, sans être soutenu par l’Etat. C’est en cela que le système est intéressant, et tout le monde est gagnant ! »

Sur son exploitation, Philippe Collin génère 2 tonnes par hectare de carbone soit environ 600 tonnes par an. L’unité de méthanisation lui permet de stocker 1 500 tonnes par an. Le bilan (émission – stock) est donc négatif, c’est positif ! Selon lui, « chaque système peut être vertueux pour réduire son empreinte carbone de l’agriculture. C’est le cas de l’agroforesterie ou du pâturage. La méthanisation n’est pas le seul moyen pour obtenir un bilan carbone nul voire négatif. » Rouler au gaz permet aux clients de trouver un intérêt écologique et économique et aux industriels de valoriser leur image vis-à-vis de leur empreinte carbone.

L’avenir offre de belles perspectives

D’ici plusieurs années, Philippe Collin espère pouvoir équiper du matériel agricole pour permettre aux exploitations d’être plus autonomes et de moins subir les fluctuations des cours du pétrole. « Aujourd’hui, je consomme 25 000 litres de fioul sur mon exploitation et je produis 60 000 kg de biogaz soit plus de deux fois ma consommation de carburant. Je suis rassuré pour l’avenir ! Toutes les énergies seront bénéfiques pour substituer l’essence et le diesel et diversifier nos sources d’énergie ! » En 2021, cinq tracteurs seront équipés au niveau français. La démarche sera plutôt expérimentale et de communication. Pour les constructeurs, les perspectives de développement sont motivantes même si elles ne sont pas encore suffisamment rentables.

Philippe Collin réfléchit à d’autres projets. « Avec trois autres exploitants, nous étudions nos forces et nos faiblesses pour les équilibrer. Nous voulons nous engager sur des actes environnementaux forts, travailler sur le potentiel nourricier de nos structures réunies favoriser davantage la biodiversité. Nous sommes convaincus que réfléchir à plusieurs est plus impactant que tout seul ! »

© Julie GUICHON

 

Témoignage

« Avec le photovoltaïque, je ne prends aucun risque »

Le bâtiment rayonne depuis quelques mois dans le paysage de Nuisement. Benoît Baronnier a franchi le pas : il a installé en mai, un bâtiment agricole de 500 m2 doté de panneaux photovoltaïques sur le toit. « J’avais besoin d’un espace pour stocker plus de céréales et de matériels. Mais cela ne suffisait pas à financer le projet. Vivescia m’a parlé du photovoltaïque pour compléter, cela a été le déclic », raconte l’agriculteur en polyculture installé à Puits-et-Nuisement, dans le Barrois. Septique au départ, notamment sur la rentabilité de cette énergie, Benoît Baronnier se rend assez vite à l’évidence : « Mon installation, qui produit 36 gigawatt/heure, doit me permettre de rentabiliser l’investissement dans 15 ans. Cela ne demande pas de travail en plus, juste un relevé de compteur par an, on est payé chaque année, tout est contractualisé et garanti. » Ce qui a surtout convaincu l’exploitant, c’est qu’avec le photovoltaïque, « on ne prend aucun risque. Car le soleil continuera de briller ». Et si l’installation lui permet avant tout de financer l’achat de son bâtiment agricole pour dégager un patrimoine à terme, il reconnaît volontiers que le photovoltaïque est une bonne solution pour qui cherche de la valeur ajoutée. « Je vais toucher 1 500 euros par an pendant 15 ans. Cela me sert à rembourser mon prêt. Mais pour ceux qui ont déjà un bâtiment, c’est un revenu supplémentaire. »

© Emeline Durand