Le géobiologue vient au secours d’exploitations laitières avec une méthode peu courante : des baguettes de sourcier. Même les éleveurs aubois les plus cartésiens ont pu en constater les effets inédits.
Dire que le courant passe avec Armand Benner, n’a rien d’une métaphore. Electrotechnicien de son métier, à Chaumont, le Côte-d’Orien exerce aussi une seconde profession, moins courante pourrait-on dire : il est géobiologue-sourcier-magnétiseur. Capable de ressentir les flux qui circulent sous terre, telluriques, hydrauliques, magnétiques seulement grâce à deux instruments qui ne le quittent jamais : ses baguettes de sourcier. On est loin ici de l’image d’Epinal du bout de bois composé de deux branches : les baguettes d’Amand Benner sont faites d’un alliage en laiton et rallongées par un manche. Au-delà de la forme, c’est une autre caractéristique qui interpelle : elles s’articulent toutes seules, obéissant par on ne sait quel mécanisme à ce que demande leur propriétaire. Comme souvent dans ce genre de circonstances, il faut le voir pour le croire. La renommée du quinquagénaire qui cumule à son compteur pas moins de cinquante exploitations solutionnées… depuis le début de l’année apporte aussi son crédit.
Couture
Le problème est quasiment toujours le même : un éleveur appelle Armand Benner parce que ses vaches rechignent à aller en salle de traite, multiplient les mammites, produisent moins de lait. Pas de doute pour le professionnel : c’est une histoire de courants souterrains. À l’aide de ses baguettes, il quadrille l’exploitation, repère les failles telluriques ou magnétiques, et les répare. Ça a l’air simple mais sur le terrain c’est tout autre chose. « Mon premier geste en arrivant est d’observer comment se comportent les animaux », décrit le géobiologue. Souvent, les vaches fuient les ossatures métalliques. Elles lapent le dessus de l’eau car elles perçoivent des cercles électriques à la surface qu’elles veulent enlever. « Et comme elles prennent un coup de jus, elles n’y reviennent pas, déduit Armand Benner. Elles n’osent plus ni boire ni entrer en salle de traite. » Voilà pour l’analyse de la situation. Armand Benner sort alors de ses poches ses baguettes et avance d’un pas décidé dans la largeur du terrain, ses instruments tantôt positionnés au niveau des poumons, du ventre puis de la vessie pour partir à la recherche des « nuisances ». Il stoppe soudain sa cadence : les baguettes viennent étrangement de pivoter vers l’extérieur. « Voilà la faille, c’est au niveau de mon estomac cela signifie que c’est de l’électricité ; il y a une coupure qui se prolonge jusque sous le bâtiment d’élevage », assure le professionnel. Il marque un silence : une baguette se tourne à nouveau, cette fois à contresens. « Elle m’indique la polarité, le sens du courant », sourit Armand Benner. Difficile à croire mais le géobiologue balaie l’irrationnel de la situation d’un « mon corps fonctionne comme une antenne ». Place maintenant à la réparation. À l’aide de fils de cuivre qu’il plante en terre en forme de « U », le géobiologue « raccommode », répare la faille. « Ici, indique Armand Benner, on est tout proche d’une carrière, la terre vibre, le sol est instable, c’est normal que des failles se produisent ». Le résultat est quasiment immédiat. « Dès le lendemain s’étonne encore Antoine Schmith, directeur d’exploitation du lycée agricole La Barotte à Châtillon-sur-Seine, où Armand Benner est intervenu il y a peu : on a gagné un quart d’heure de traite et les vaches n’ont plus du tout boudé certains espaces du bâtiment. »
Electrosensible
Même son de cloche dans l’Aube. « Je viens d’une exploitation à Morvilliers, les vaches ne voulaient plus rentrer dans le robot, deux jours plus tard, je recevais un coup de fil de l’éleveur pour me dire qu’elles y allaient de nouveau et que la production avait recommencé à augmenter », rapporte le sourcier, qui compte le Gaec des Tourelles dans ses plus vieux clients. Bluffant. Et si les plus réticents ne veulent pas entendre parler de la méthode, la réputation d’Armand Benner, présent lors de la dernière assemblée générale du Groupement de Défense Sanitaire de l’Aube en début d’année, le précède. Depuis dix ans, il sillonne les routes de sa région et de toute la France pour exercer un talent qui ne lui est pas venu tout seul. « Un jour il y a vingt ans, j’essayais de dépanner un ami éleveur qui avait le même problème. En tant qu’électricien, j’ai refait toutes les mises à la terre. C’était mieux mais pas suffisant. Il a fait appel à un géobiologue de Bretagne, j’étais là ce jour là. Il a tout de suite senti que je réagissais, j’avais les mains noircies. Il m’a offert mes premières baguettes ». Depuis, Armand Benner perfectionne son art. S’il se dit lui-même électrosensible, il a mis dix ans pour comprendre les phénomènes. Capable de détecter des sources, Armand Benner est désormais également plébiscité en amont des constructions. On le sollicite pour positionner les bâtiments d’élevages en fonction des courants et faire des préconisations électriques. Si l’expérience vous branche, contactez-le : soyez en sûr, il vous tiendra au courant.
© EMELINE DURAND