Bruno Forget commissaire général de la Foire de Châlons-en-Champagne a répondu à nos questions. Pour lui, aucun doute, la Foire aura bien lieu.
Patron de la Foire de Châlons-en-Champagne (Marne), Bruno Forget n’imagine pas un seul instant que l’événement n’ait pas lieu à la rentrée. Pourtant, les annulations se succèdent. Dernière en date, la Foire aux Vins de Colmar qui devait se tenir du 24 juillet au 2 août n’aura pas lieu. La Foire de Châlons devrait commencer le vendredi 28 août pour durer 11 jours. La fenêtre de tir semble compatible avec le calendrier de déconfinement fixé par le gouvernement.
La 74e Foire de Châlons aura-t-elle lieu ?
Oui et heureusement. J’en ai acquis la certitude le 13 avril quand le président de la République a annoncé la reprise des évènements grand public. Nous sommes rassurés d’autant que l’organisation du Tour de France a été confirmée pour le 29 août. Ensuite, il y a la prise de parole du Premier ministre Édouard Philippe à l’Assemblée nationale le mardi 28 avril. Sa décision d’annuler l’ensemble des rassemblements de plus de 5 000 personnes jusqu’au mois de septembre pourrait décaler la Foire de quelques jours. Je suis en relation avec le préfet de la Marne Pierre N’Gahane pour étudier toutes les options. Dans tous les cas la Foire aura lieu.
Quel sera l’état d’esprit de cet événement qui marque la rentrée ?
Un état d’esprit incarnant le renouveau dans les esprits et la reprise de l’activité. Mais il faudra aussi savoir se projeter dans le monde d’après, en rejetant définitivement l’idée que l’humanité et le progrès étaient parvenus à dominer la nature. Ceux qu’ils l’ont compris, c’est ceux qui au quotidien vivent de la nature, de ses caprices et ses bienfaits, ce sont les agriculteurs. La foire sera plus que jamais le grand rendez-vous de la rentrée et l’agriculture sera au centre de l’actualité car elle est la réponse aux enjeux mis en évidence lors de cette crise sanitaire.
Comment réagissent vos exposants ?
Après deux mois et demi de messages anxiogènes sans perspectives, ils trouvent enfin un horizon et disent qu’ils vont pouvoir revivre, dans l’intérêt de leurs entreprises et de leurs salariés. La Foire peut contribuer à relancer l’économie, c’est le format privilégié pour réaliser des affaires. L’adage « on achète bien là où on se sent bien » trouve là tout son sens.
Quelles seront les mesures de précautions sanitaires qui seront prises ?
Toutes celles qui seront imposées par les services de l’État ! La foire se déroulera dans le parfait respect de la réglementation et dans des conditions de sécurité sanitaires les plus strictes. Pour l’heure, nous avons prévu une intervention d’une société de nettoyage, l’aménagement de distributeurs de gel hydroalcoolique. Chacun des acteurs sera sensibilisé. Et faire de notre foire, un événement écoresponsable participera concrètement à la protection de nos visiteurs. .
C’est la deuxième édition qui se tient dans des circonstances compliquées après celle de 2016 qui a suivi l’attentat de Nice. Comment vous adaptez-vous ?
Vous avez raison d’évoquer ces terribles circonstances qui nous ont fait quitter l’ère de l’insouciance. Le lendemain de cet attentat, nous avons avec le préfet M. Conus, élaboré un scénario avec tout un dispositif de mesures de sécurité sans précédent. Naturellement, nous avons associé les exposants et les prestataires et sensibilisé les visiteurs C’est ce que nous ferons pour cette foire, en appelant à la responsabilité individuelle. Par exemple, si une personne est fiévreuse ou des symptômes évidents, nous l’inviterons à rester confinée.
Le succès de la foire est dû aussi à ses concerts, sont-ils maintenus ?
Je répondrai comme précédemment, oui bien sûr.
La santé et l’économie sont-ils devenus des frères ennemis ?
Ça ne devrait pas. Attention à ne pas tomber dans le sanitairement correct au risque de faire tomber notre économie toute entière.
Vous citez parfois le philosophe Michel de Montaigne selon qui « tu ne meurs pas de ce que tu es malade, tu meurs de ce que tu es vivant »….
Cette phrase prend tout son sens aujourd’hui où le principe de précaution ou du risque zéro font de la mort un tabou.
C’est la deuxième foire agricole de France, quelle place occupera l’agriculture cette année ?
Soyons clairs, l’agriculture est la réponse aux enjeux de cette crise sans précédent parce qu’elle apporte un ensemble de réponses stratégiques qui nous sont posées : l’indépendance et la sécurité alimentaire, la transition énergétique, la lutte contre le réchauffement climatique, le développement de la biodiversité, l’économie de proximité avec les circuits courts, le tourisme, la valorisation de filières végétales par une transformation relocalisée, les milliers d’emplois à pourvoir… À travers ses fermes et gîtes, ses aménagements et l’embellissement du patrimoine et des paysages, l’agriculture va jouer un rôle essentiel dans le développement du tourisme de proximité. En lien avec les agences régionales du tourisme du Grand Est, des Hauts de France et d’Île de France, en attendant la Wallonie, la foire sera transformée en vitrine de l’excellence, de la diversité et de la richesse de nos territoires.
N’auriez-vous pas intérêt à regrouper d’autres manifestations à caractère agricole pour gagner davantage en visibilité ?
Oui, devant la suppression de dizaines de salons agricoles, j’invite leurs organisateurs à venir promouvoir leurs événements en associant leurs exposants s’ils le souhaitent. J’ai également proposé à la présidente de Planet’A de venir y organiser le forum qui ne se tiendra pas en juin.
© Propos recueillis par Richard Cremonini
