Alors que la Chanvrière, plus grosse usine de production de chanvre en France, vient de doubler ses capacités de production, le Pôle Européen du Chanvre veut implanter localement de nouveaux débouchés pour dynamiser le territoire.
Il n’a pas encore de lieu géographique défini, ni d’équipe… pourtant, le Pôle Européen du Chanvre, lancé officiellement en novembre 2018, est bel et bien sur les rails. La toute première réunion s’est tenue mi-janvier : elle devait mettre en place les différents groupes de travail, première action très concrète de ce cluster né il y a un d’une grande ambition : trouver de nouveaux débouchés au chanvre, les développer et les implanter localement. Il faut dire que le département de l’Aube est un gros producteur : 440 agriculteurs de l’Aube et des départements limitrophes, alimentent la Chanvrière. La plus importante unité de production de chanvre en Europe vient de doubler ses capacités de production en s’installant sur un tout nouveau site au nord de Troyes. Pour Benoîte Savourat, président de la Chanvrière et du collectif Construction Chanvre Grand Est, qui porte le déploiement du Pôle Européen du Chanvre, « on est au démarrage d’une véritable nouvelle économie liée au chanvre. »
Si des débouchés existent déjà localement autour du bâtiment, du textile ou encore de la plasturgie, le Pôle a identifié d’autres filières consommatrices de chanvre comme la pharmaceutique, la cosmétique ou encore l’alimentaire qui pourraient développer de nouvelles applications et produits avec le chanvre. « L’idée serait de créer une structure pour que chacun ait envie de s’implanter là où le chanvre est historiquement produit, dans un endroit qui alimente déjà de nombreux marchés autour de la fibre, de la graine, des fines de chanvre ou encore de la Chènevotte, utilisée notamment pour la fabrication d’isolants », ambitionne Benoît Savourat.
Financements à venir
Fibre pour le textile, granulats, paillage des sols servant à la culture des champignons, jusqu’aux fibres de chanvre valorisées en compost ou dans la méthanisation, les utilisations de la plante sont de plus en plus nombreuses. A contrario, il n’existe pas à l’échelle européenne de structure centralisant à la fois la réflexion et la recherche sur ces débouchés. Le Pôle Européen du Chanvre a donc toute sa légitimité dans l’Aube. S’il attend des financements régionaux et européens pour prendre ses quartiers, le Pôle s’est déjà mis au travail. « Nous venons de constituer avec les entreprises des différents secteurs concernés sept groupes de travail. Charge à chacun de réfléchir et de faire des propositions d’ici la fin de l’année sur comment créer de la valeur économique sur le territoire en lien avec le chanvre », dévoile le président.
La métropole de Troyes, la Région sont très intéressées et soutiennent la démarche. « Il faut maintenant que les entreprises nous rejoignent», invite Benoît Savourat. Une cinquantaine – dont le nom reste pour l’instant confidentiel – auraient déjà fait part de leur intérêt. Les fonds européens FEADER et l’enveloppe du conseil régional Grand Est devraient permettre une fois débloqué de lancer les premiers recrutements et de trouver un site où s’installer physiquement. Il reste aussi au Pôle Européen du Chanvre à trouver une partie du budget de 900 000 euros nécessaires pour les trois premières années. Pour Benoît Savourat, « on a tout à construire : il y a un modèle à trouver pour que cette organisation soit pérenne. » © Emeline Durand
La Chanvrière double ses capacités de production
Historiquement implantée depuis 1973 à Bar-sur-Aube, la Chanvrière vient d’emménager dans de tous nouveaux bâtiments à Saint-Lyé, à une dizaine de minutes de Troyes. L’entreprise cherchait depuis quelques années à se rapprocher du bassin des producteurs de chanvre, principalement concentrés au nord du département, en Champagne crayeuse. Pour faire face aux besoins des marchés, elle souhaitait aussi développer son outil de production. C’est chose faite depuis mi-janvier. La Chanvrière, qui produisait jusqu’à présent 50 000 tonnes de paille par an, est désormais en capacité de doubler sa production, grâce à un investissement de 25 millions d’euros. L’outil va monter en progression doucement, l’usine de Bar-sur-Aube restant pour l’instant opérationnelle normalement jusqu’à cet été. Une dizaine de personnes doit également être recrutée, portant l’effectif à 49 équivalents temps-plein, contre 40 actuellement. Si son marché principal reste l’industrie papetière, la Chanvrière est aussi présente sur celui des graines, (pour l’oisellerie et la pêche), des granulats (pour le bâtiment), de paillage ou encore de la Chènevotte. Elle compte gagner des parts de marché dans un autre marché, porteur : celui de l’industrie textile.