Pour Sophie Nicolardot, en charge du déploiement du dispositif OSER en Barrois, il existe pour les exploitations de cette zone dite intermédiaire, trois leviers, gages de résilience et de performance.
Initié il y a deux ans pour accompagner les agriculteurs du secteur du Barrois à voir leurs revenus progresser, le dispositif OSER en Barrois se déploie depuis mi-septembre. Que se passe-t-il de visible sur le terrain ?
Oser en Barois est une initiative multi-partenariale menée avec la Chambre d’agriculture de l’Aube, de la Haute-Marne, CERFrance et Groupama lancée en avril dernier pour gagner en performance et recréer de la valeur sur les exploitations du Barrois. Il a d’abord fallu comprendre par des enquêtes et analyses pourquoi il y avait de tels écarts entre les revenus. C’est ce travail qui est fait depuis deux ans. Grâce à lui, nous avons identifié des points communs entre des exploitations qui s’en sortent le mieux. L’objectif est de les déployer dans les autres exploitations. Depuis cet automne, des conseillers des différents partenaires rencontrent individuellement les agriculteurs pour proposer un autodiagnostic et les accompagner de manière personnalisée dans l’amélioration de leurs revenus. D’ici fin février, 700 rendez-vous auront été effectués.
Le travail d’enquête a révélé que pour être performant économiquement dans ce secteur, il existe trois leviers majeurs. Lesquels ?
Le premier concerne l’agronomie et le travail du sol : une bonne maîtrise avec une rotation allongée – et plus des rotations que l’on a simplifié au maximum -, des charges opérationnelles maîtrisée et des stratégies de décision bien identifiées avec mise en place de couverts, portent leurs fruits. Le deuxième axe, c’est la bonne gestion et la maîtrise de la commercialisation. Ceux qui s’en sortent sont des agriculteurs stockeurs, qui se mettent sur des marchés de niche et s’occupent véritablement de leur commercialisation. Dernier point, les investissements : il faut les modérer pour durer. Surtout, ils doivent répondre à une vraie stratégie globale d’exploitation avec des axes de développement clairement identifiés. C’est vers ce modèle vertueux que nous voulons amener les agriculteurs.
Ce que vous dites, ce n’est en fait que de la stratégie d’entreprise pure et simple…
Nous voulons encourager le bon sens paysan et surtout accompagner les agriculteurs dans leur stratégie globale. L’objectif est de montrer qu’il existe des solutions auxquelles on ne pense pas forcément quand on est dans le rythme de travail quotidien.
Par quels moyens recréer de la valeur sur ce territoire ?
On sait que la formation peut aider. Nous avons mis en place un catalogue spécial, avec des formations labellisées OSER en Barrois. Des sessions ont déjà commencé sur les thèmes « Allonger sa rotation pour gagner en performance », ou « Gagner sur les intrants, c’est possible ». L’objectif à terme, c’est aussi de recréer des projets de territoire, autour de l’économie circulaire, de services rendus par l’agriculture (méthanisation, photovoltaïque, circuits courts et restauration collective, …) Nous n’y sommes pas encore. C’est la 2ème phase du projet. Pour l’instant, nous voulons d’abord rencontrer les agriculteurs du Barrois et leur faire prendre conscience qu’ils ne peuvent plus continuer à travailler de la même manière s’ils veulent s’en sortir.
Au-delà de la recherche de rentabilité, n’y a-t-il pas, derrière ce dispositif, également un enjeu social ?
Nos rencontres individuelles peuvent évidemment être un moyen de repérer d’éventuelles situations compliquées. Ce qui est intéressant c’est qu’à travers ces rendez-vous, les exploitants se sentent pris en considération. On est là pour eux, pour leur apporter des stratégies gagnantes et la démarche est très appréciée. Nous échangeons ensemble sur les pistes possibles, mais au final c’est l’agriculteur qui décide d’enclencher la démarche de changement.
© Propos recueillis par Emeline Durand